headerFR

Organisation > Axes de recherche

1. Macroécologie, macroévolution et patrons spatio-temporels de biodiversite

La macroécologie et la macroévolution se penchent sur la recherche et la compréhension des types, distributions, abondances, et diversité des espèces et biomes, de l’échelle locale à l’échelle globale, et le développement et les tests des explications théoriques de ces grands patrons.

Sur ces sujets, les deux approches de modélisation dominantes dans la littérature, d'un côté la modélisation des patrons spatiaux de la biodiversité et d'un autre côté la modélisation des patrons « évolutifs » ou temporels de la biodiversité, ont encore peu d'intégration entre elles. Mais les patrons de biodiversité observés aujourd’hui sont le fruit d’une combinaison des processus écologiques ainsi que des processus historiques, et il conviendrait de mettre en place un cadre théorique commun permettant leur intégration afin de tester des hypothèses plus robustes pouvant expliquer ces phénomènes.

Mieux intégrer nos connaissances en écologie dans les modèles macroévolutifs, aussi bien que mieux intégrer les concepts, modèles et techniques issus de la macroévolution en écologie sont tous les deux devenus nécessaires. L’objectif du GDR sur ce thème est de coordonner et d’accélérer les recherches en cours en France permettant d’intégrer les modèles de la macroévolution avec ceux de la macroécologie et de l’écologie des communautés afin de développer des outils de modélisation de la biodiversité qui prennent mieux en compte les facteurs historiques et écologiques expliquant les patrons de biodiversité actuels.

2. Réseaux d'interactions

Parce qu'ils permettent de décrire les interactions entre les espèces dans les systèmes écologiques, les réseaux d'interactions sont à la base de nombreuses questions fondamentales en écologie, que ce soit pour comprendre les mécanismes qui déterminent les interactions entre les espèces ou pour prédire les conséquences de ces interactions sur la dynamique des systèmes écologiques et leurs réponses à des perturbations diverses (pertes d'espèces, etc.). En plus, l'étude des réseaux est aussi fortement reliée au débat sur la relation entre complexité et stabilité des communautés.

La vaste majorité des études sur les réseaux s'est focalisée sur des types d'interaction donnés, étudiés isolément les uns des autres: réseaux trophiques (interactions de prédation), réseaux hôtes-parasites, réseaux mutualistes plantes-pollinisateurs, etc. Certaines interactions et certains groupes d’espèces ont également été ignorés dans les approches empiriques et théoriques. Ainsi la plupart des réseaux trophiques étudiés ignore les interactions avec les composantes abiotiques de l’écosystèmes, comme le recyclage des nutriments et les interactions entre les réseaux verts (fondés sur les producteurs primaires) et bruns (fondés sur les décomposeurs). Les approches réseaux ont aussi systématiquement ignoré la plus large composante de la biodiversité, à savoir les micro-organismes, en particulier les procaryotes (bactéries et Archaea), et leurs associations avec des organismes plus larges.

Il est maintenant nécessaire de développer une approche plus intégrative de l'étude des réseaux permettant de mieux considérer la diversité des organismes et des interactions au sein des systèmes écologiques. Pour ce faire, la recherche sur les réseaux d’interactions nécessite d’une part de nouveaux jeux de données empiriques mais aussi de nouvelles théories permettant d’appréhender les conséquences écologiques et évolutives de la diversité d’interactions dans les réseaux. L’objectif du GDR sur ce thème est de coordonner et de développer les recherches en cours en France sur des questions émergentes dans le domaine des réseaux d’interactions. Le groupe de travail thématique visera notamment à développer les recherches vers une approche plus intégrative de l'étude des réseaux considérant la diversité des interactions dans les écosystèmes.

3. Diversité et stabilité des systèmes écologiques

Un grand nombre d’études théoriques et expérimentales ont à présent démontré sans équivoque qu’une perte de biodiversité avait des conséquences importantes pour le fonctionnement des écosystèmes et les services qu’ils fournissent aux sociétés, notamment en réduisant la capacité des communautés à utiliser les ressources disponibles, à les convertir en nouvelle biomasse et à décomposer et recycler les nutriments.

Un nombre croissant de résultats expérimentaux montre en outre que la biodiversité augmente la stabilité des propriétés des écosystèmes. Cet effet stabilisateur est particulièrement intéressant car il suggère que la biodiversité joue un rôle clef dans la durabilité des écosystèmes, et par conséquent aussi des sociétés qui en dépendent, face à des changements d’environnement.

Alors que la théorie écologique actuellement dominante, développée dans les années 1970, prédit que la diversité et la complexité des communautés favorisent leur instabilité, et non leur stabilité, les expériences récentes ont montré que la diversité spécifique avait souvent des effets opposés à l’échelle des populations (où l’effet est souvent déstabilisateur) et à l’échelle de l’écosystème dans son ensemble (où l’effet est généralement stabilisateur), un résultat que la théorie classique ne permet pas d’expliquer.

Il est donc nécessaire de bâtir une nouvelle théorie qui puisse expliquer et prédire les résultats expérimentaux, mais aussi qui permet mieux comprendre et prédire la capacité des écosystèmes à résister à des perturbations. Une théorie de la stabilité des écosystèmes centrée sur la variabilité temporelle et spatiale est donc nécessaire. L’objectif du GDR sur ce thème est de coordonner et d’accélérer les recherches en cours en France permettant de dégager une nouvelle théorie de la stabilité des systèmes écologiques et de ses relations avec la biodiversité qui soit à même d’éclairer et de prédire les données empiriques et les résultats expérimentaux.

4. Dynamique spatiale, métacommunautés et métaécosystèmes

Les concepts et modèles liant dynamique locale et dynamique régionale sont définis au moyen du préfixe « méta », par analogie avec le premier d’entre eux, la métapopulation (population de populations). Une métapopulation est un réseau spatial où chaque nœud peut héberger une population d’un organisme. Par extension, une métacommunauté désigne un réseau spatial où chaque nœud peut héberger une communauté, c’est-à-dire un ensemble d’organismes d’espèces différentes partageant des facteurs limitants. L’approche « méta » vise à répondre à des questions classiques telles que la stabilité ou la coexistence des espèces au sein des communautés, mais aussi à des questions plus appliquées telles que le fonctionnement des écosystèmes, la topologie émergente des réseaux d’interactions et la biologie de la conservation.

Les transformations des écosystèmes et la destruction des habitats naturels ont progressé considérablement durant les trois derniers siècles. Ces modifications de l’environnement sont les facteurs majeurs de la crise actuelle de la biodiversité et de l’amoindrissement des services écosystémiques. Le cadre spatialement implicite proposé par les approches « méta » permet d’aborder les dynamiques de tels changements dans des habitats fragmentés et ainsi de produire des outils méthodologiques adaptés aux questions de conservation.

Le champ de l’application de l’approche « méta » s’est fortement diversifié ces derrières années, explorant les champs de l’écologie spatiale des réseaux trophiques, du fonctionnement des écosystèmes ainsi que la biogéographie. Par exemple, considérer la dynamique du recyclage des nutriments non plus à une échelle locale, mais à l’échelle d’un métaécosystème, en prenant en compte les flux de détritus et de nutriments, mène à des théories et des prédictions plus riches sur la dynamique de ces systèmes. L’intégration de réseaux trophiques dans un système spatialement structuré permet également de développer une théorie plus riche permettant de prendre en compte la variabilité spatiale et temporelle des réseaux trophiques observés. Enfin, les approches en métacommunauté commencent  aussi à intégrer l’évolution génétique des espèces.

L’objectif du GDR sur ce thème est de coordonner et de stimuler les recherches théoriques menées en France dans le domaine des métacommunautés et des métaécosystèmes afin d’améliorer la compréhension de la dynamique spatiale de la biodiversité, des réseaux trophiques, du fonctionnement des écosystèmes, de l’évolution des espèces et des effets des changements globaux.

5. Modèles prédictifs des changements de biodiversité

L’un des enjeux majeurs de la modélisation en écologie est de faire des prédictions réalistes sur un ensemble de problèmes environnementaux. Deux exemples pratiques de ces problèmes ont été largement abordés dans la littérature au cours de la dernière décennie, et ils illustrent bien les limites actuelles des modèles en écologie.

Le premier exemple concerne les modèles de distribution d’espèces, qui ont largement été étudiés pour prédire les distributions futures des espèces face aux changements climatiques. La plupart des approches sont statistiques par nature et reposent sur la corrélation des occurrences actuelles d’une espèce et des conditions climatiques, qui, combinées, permettent de créer une enveloppe bioclimatique. Ces modèles ne reposent pas sur une compréhension mécaniste des processus qui sous-tendent les modifications d’aire de distribution, que ce soit des processus physiologiques, d’interactions biotiques, ou ceux liés au potentiel de dispersion. Pour puissantes qu’elles soient, les approches statistiques ne permettent pas de faire des prédictions robustes pour des espèces mal connues ou de prendre en compte la réponse évolutive des espèces. Un deuxième exemple concerne les modèles prédictifs de la réponse des écosystèmes aux changements climatiques. Ces modèles ont principalement été développés par la communauté des modélisateurs du climat et prennent surtout en compte la réponse physiologique des plantes aux changements des cycles de l’eau, du carbone et des nutriments (ex : Orchidee, LPJ, ...), qui pourrait altérer de manière radicale la dynamique future du système terre. Par contre, la réponse des décomposeurs est modélisée de manière très simpliste et, plus généralement, l’effet des niveaux trophiques autres que les plantes est en général ignoré dans ces modèles, que ce soit les décomposeurs microbiens et arthropodes ou les herbivores (tant vertébrés qu’arthropodes). Une telle simplification est sans doute acceptable en première approximation lorsque seuls les cycles du carbone et de l’eau sont considérés, mais lorsque des cycles de nutriments tels que l’azote ou le phosphore sont étudiés, ignorer les organismes hétérotrophes revient à ignorer une bonne partie du fonctionnement essentiel de ces cycles.

Les limites actuelles des deux approches évoquées ci-dessus sont en partie inévitables. Par contre, le problème essentiel posé ici est celui de prédire des dynamiques de populations (dans le premier cas) ou d’écosystèmes (dans le second) sur une large échelle spatiale, tout en ne perdant pas le niveau de détail individuel, celui qui permet à l’organisme d’assurer sa reproduction, sa dispersion, ou son acclimatation aux conditions environnementales. Le groupe de travail thématique consacré à ce thème se propose d’animer une réflexion au sein de la communauté de recherche française afin de réaliser plusieurs actions. Premièrement, il visera à développer des outils théoriques génériques pour la dérivation de modèles macroscopiques à partir de modèles individu-centrés ou population-centrés. Deuxièmement, il étudiera certaines questions clefs pour lesquelles les équipes impliquées ont des compétences reconnues, notamment les modèles dynamiques de distribution d’espèces et les modèles de dynamique forestière, afin d’explorer comment de telles approches sont pratiques à mettre en œuvre. Finalement, en lien avec le thème 6 et le GDR Écologie Statistique, il explorera les méthodes d’inférence pour paramétrer et valider ces modèles.

6. Liens entre modèles et données

Il existe une diversité de points de vue en écologie sur la place des données dans le processus de modélisation. A un extrême du continuum, les données ont un rôle de source d’inspiration. Elles servent alors à extraire des motifs généraux caractéristiques, que des travaux théoriques viseront à expliquer. A l’autre extrême du continuum, les données sont perçues comme des cibles que les modèles doivent reproduire finement. Le long de ce continuum, une diversité de pratiques existent, qui font un usage varié des données et suscitent une diversité de méthodes d’analyses de ces données, comme l’identification de motifs caractéristiques, la comparaison qualitative entre prédictions des modèles et données, ou encore l’inférence statistique quantitative (et la validation) à partir de données potentiellement hétérogènes, bruitées et/ou partiellement informatives sur les processus en jeu.

Quand l’adéquation entre prédictions d’un modèle et données devient un objectif, se pose la question de savoir quel écart entre données et modèle est acceptable. Même si des méthodes statistiques comme les techniques de « model checking » peuvent être mobilisées pour tester l’adéquation entre modèles et données, la question reste ouverte sur la rigueur à adopter dans la comparaison entre modèles et données.

Une autre question ouverte est celle de la complexité optimale des modèles en écologie. Est-il possible de formaliser les raisonnements implicites effectués par les écologues dans leur activité de construction de modèles ? Cela pourrait permettre d’élaborer des clés utilisables par les écologues et d’anticiper des maladresses lors de la conception de modèles en lien avec des données.

Enfin, une tendance lourde en écologie est également le recours croissant à des simulations informatiques.  Ce recours à des simulations est à la fois très stimulant car il permet d’explorer de manière efficace des idées jusque-là peu étudiées, mais il est en même temps une source potentielle de confusions si les détails et hypothèses algorithmiques ne sont pas rigoureusement présentés et si la robustesse des résultats à ces choix algorithmiques n’est pas analysée. Ce constat pose des questions théoriques nouvelles sur la façon de mobiliser les simulations informatiques dans une démarche d’écologie théorique.

Le groupe de travail thématique consacré à ce thème se propose de réaliser un ensemble d’articles de synthèse afin de répondre à un certain nombre de questions entourant l’activité de modélisation en écologie théorique. En regroupant des écologues de différentes sensibilités sur l’utilisation des données en écologie théorique, cette activité du GDR permettra de rechercher les consensus sur lesquels les écologues peuvent s’accorder, plutôt que de chercher à opposer des approches complémentaires, comme il a été fait récemment dans la littérature.

Personnes connectées : 1 Flux RSS